Il y a quelque chose d’assez extraordinaire chez Ravel. Sans être lui-même un virtuose, à l’égal de Liszt, il a écrit quelques-unes des pages qui poussent à l’extrême les possibilités du piano et qui requièrent à l’exécution une virtuosité encore plus grande que celle de son aîné.

Ainsi, vers 1910, il a déjà à son actif le recueil magistral des Miroirs de 1904-1905, ou Gaspard de la Nuit, avec son stupéfiant et diabolique morceau intitulé Scarbo, ou encore le merveilleux album de Ma mère l’Oye pour piano à quatre mains. Sans compter plusieurs autres titres.

Ces pages, déjà éblouissantes en elles-mêmes, pour piano à deux ou quatre mains, ou pour deux pianos quelquefois, Ravel va vouloir les habiller des couleurs de l’orchestre et en faire de nouveaux chefs-d’œuvre. Quand il ne s’avisera pas de faire la même chose avec quelques-uns de ses confrères, l’exemple le plus connu étant celui des Tableaux d’une exposition de Moussorgski, qui a éclipsé la version originale pour piano seul.

Sans se distinguer plus spécialement au pupitre de chef d’orchestre qu’au clavier, il n’en est pas moins reconnu comme « le plus grand orchestrateur français » par le musicologue Marcel Marnat, qui a écrit sur lui une monographie faisant autorité.

La conférence se propose donc de montrer en quoi il mérite ce titre, par les remarquables métamorphoses qu’il réalise en passant du piano à l’orchestre, d’autres partitions majeures de la maturité étant conçues directement pour l’orchestre.

L’exposé s’articulera sur quelques centres d’intérêt qui ont particulièrement inspiré Ravel dans le genre de la musique symphonique, en excluant toutefois les deux concertos, car il fallait bien se fixer une limite.